Il est un des 150 membres à avoir participé à la Convention Citoyenne pour le Climat (CCC). Précisément sur le thème « consommer ». D’abord professionnel de la communication son implication à la CCC propose une perspective pertinente.
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Parcours express |
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S.B. : Je me définirais comme un pur produit de la communication et du marketing. J’ai une formation littéraire, puis après mon diplôme de l’EFAP, je suis passé par les relations presse et la communication globale, notamment à la Fédération Française Handisport. Aujourd’hui je travaille chez OGF, une entreprise de services funéraires en tant que Responsable Marketing Communication Réseau. J’ai eu le privilège de participer à la Convention Citoyenne pour le Climat (CCC), après tirage au sort [1]. J’ai contribué à la partie « consommer », sans a priori et revendication particulière. Mais plutôt en mode « ma recommandation en matière de communication ». |
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En matière d’écologie… |
S.B. : Je me situe dans le « milieu haut ». Dit autrement, je ne suis pas dans une approche militante mais cela ne m’empêche pas d’avoir des convictions et d’agir. Je considère que le climat va mal, ou encore qu’il est absurde d’acheter chaque année 12 kilos de vêtements produits par des esclaves en Chine. Dans le même temps, je trie par exemple mes déchets, j’ai un compost sur mon balcon parisien, je fabrique ma propre lessive, je fais beaucoup d’achats de seconde main, et je me déplace à vélo. |
S.B. : Je vais vous répondre par une autre question : le coupable est-il la pub ou les consommateurs ? Il me semble que ce sont plutôt ces derniers qui font l’acte d’achat. La publicité est un levier. Elle peut faire des choses bien et contribuer à la nécessaire transition de notre société.
Bien-sûr, je n’ignore pas l’éternel débat : créer ou répondre à un besoin. Mais je refuse de voir la communication comme la seule responsable. Je sais que, s’il y a un bien un secteur qui est capable de s’adapter et de porter des nouvelles tendances, c’est celui du marketing et de la pub ! D’ailleurs, les choses sont déjà en route. Quand on s’intéresse aux publicités dans les médias, on constate que les deux-tiers des annonces ont trait à la responsabilité des marques, à l’écologie, au commerce équitable, etc.
Ne tuons pas la pub ! Regardons plutôt du côté des produits. En distinguant ceux qui sont hautement carbonés, qu’il faut peut-être interdire, de ceux à faible impact environnemental qu’il faut valoriser. Ne l’oublions pas : la communication crée de la valeur dans un système de valeurs !
S.B. : En arrivant à la Convention Citoyenne pour le Climat, je portais le déjà principe de la régulation de la pub. Sans être extrémiste sur ce point, certains produits, je vous le disais, nécessitent d’être mieux et plus régulés. Après tout, la loi Évin [2] n’a pas tué l’alcool et le tabac. Alors pourquoi pas une « Loi Évin sur le climat » ? Car il y a des aberrations. Je pense par exemple à ces avions qui tractent des banderoles publicitaires sur les plages l’été. Les consommateurs honnissent déjà ces annonceurs. Interdire cette pratique, au final, ne serait qu’une formalité.
La publicité évolue, les consommateurs avec. Ou l’inverse peut-être ? Un jour, je suis certain qu’on se moquera de certaines pubs, comme on le fait aujourd’hui des publicités de cigarettes d’il y a trente ans !
Enfin, je précise que réguler ne veut pas dire interdire. La régulation n’est pas une chose nouvelle pour la pub.
S.B. : S’il s’agit de « bombarder » n’importe comment des prospectus qui font la promotion de produits fabriqués en Chine par les Ouighours [3], c’est un vrai problème. Au-delà de cette description un peu caricaturale, on sait que l’imprimé publicitaire est utile d’un point de vue économique aux ménages et à toute une filière. D’ailleurs, toutes les mesures proposées dans le cadre de la CCC prennent en compte la sphère économique. Le prospectus est un très bon outil. Avec une écoconception intelligente et un ciblage très précis, il permet de promouvoir des produits de valeur.
Il faut ainsi créer de la richesse avec le plus faible impact négatif possible. Cela passe par de nouveaux standards de qualité et des niveaux d’exigences plus élevés. Comme le disait Jean Jouzel [4] lors d’une conférence de la CCC : « il faut qu’il y ait plus d’intérêt à faire la transition que ne pas la faire ».
S.B. : Je trouve que le Oui-Pub est une façon positive de voir la publicité. Un des premiers pas vers une démarche active. Car, n’est-il pas plus logique de dire « J’en veux » quand il s’agit de prospectus, ou d’échantillons ? J’y vois une façon de mieux prendre en main sa consommation de messages publicitaires et de passer d’une forme de passivité à l’action.
S.B. : Être créatif, innovant et avoir de l’ambition ! Par principe, la contrainte permet de se dépasser et d’aller plus loin. Comme je vous le disais tout à l’heure, je n’ai aucune inquiétude pour le secteur de la publicité dont la raison d’être est la créativité. Les créatifs ont un vrai rôle à jouer. Et ils le joueront. Comme le dit fort justement, Julie Sweet, la dirigeante d’Accenture : « Sustainability is the new digital » !
Alors, bien-sûr, il y a encore des réticences dans ce milieu, et c’est bien normal. Mais, sur le long terme, ce sont ceux qui feront cette transition, comme elle a été faite dans le digital, qui s’en sortiront le mieux.
Une transition qui se traduira par un intérêt nouveau pour les consommateurs, les entreprises, mais aussi la communauté et le bien commun. Avouez que c’est mieux que le ROI ! [5]
Propos recueillis en Mars 2021
Pour aller plus loinLa Revue du Prospectus consacre un dossier inédit sur la place de la publicité dans la société. Découvrez dès maintenant… L’avis des autres experts :
La réponse de l’expert de MEDIAPOSTE, Nicole Abenhaïm : « MEDIAPOSTE accompagne les évolutions environnementales et sociétales avec ses parties prenantes » |
[1] 150 membres pour la Convention Citoyenne pour le Climat : Comment ont-ils été sélectionnés ?
[2] En référence à son promoteur, Claude Évin, la loi du 10 janvier 1991 relative à la lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme, vise à lutter contre le ces deux problématiques de santé publique. Elle établit notamment le principe d’interdiction de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif, ainsi que dans les lieux collectifs de transport. Elle a fortement limité ou interdit le droit de faire de la publicité pour les boissons alcoolisées et le tabac afin de protéger les plus jeunes.
[3] Institut australien de stratégie politique (ASPI) a mené une enquête il y a un an et épinglé des grandes marques mondiales : voir ici.
[4] Jean Jouzel est climatologue et glaciologue. Il a été vice-président du Conseil scientifique du GIEC (Groupement International des Experts sur le Climat), chercheur au CEA (Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives) et actuellement membre du CESE (Conseil économique, social et environnemental).
[5] ROI pour Return On Investment ou RSI en français pour Retour Sur Investissement. Il permet de mesurer la rentabilité des actions de marketing, là où il est possible de mettre en relation de manière relativement précise les coûts de campagne et l’activité commerciale effectivement générée.