Représentant plus de 1 500 marques, l’Union Des Marques a une parole qui compte dans le débat sur le rôle et les devoirs de la communication. Sa responsable RSE et Affaires Publiques a décrit à La Revue Du Prospectus les nombreuses et anciennes initiatives de responsabilité de l’association et de ses adhérents.
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Parcours express |
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H.B. : Je travaille à l’Union Des Marques depuis 10 ans. Avocate de formation, j’ai débuté en tant que juriste et chargée responsable des affaires publiques. Puis, avec l’évolution de l’activité et l’émergence des sujets de communication responsable, mon poste a évolué vers les affaires publiques et la RSE. Notre mission est d’accompagner nos 230 adhérents dans leur réflexion sur la responsabilité de leur communication, afin de l’aligner avec leurs engagements d’entreprise. Nous savons que communiquer dans les formats classiques de la publicité ne permet pas toujours la nuance ou la complexité. Contrairement aux rapports RSE, les formats sont courts. Il faut composer avec et c’est un de nos rôles que d’imaginer les meilleures solutions. | ||||
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En matière d’écologie… |
H.B. : Je travaille sur ces sujets par goût. Vous savez, je suis une « vieille milléniale » (rires) puisque née l’année du tout début de cette catégorie [1]. C’est une des raisons pour lesquelles j’ai voulu reprendre ce sujet à l’Union Des Marques lorsque l’occasion s’est présentée. Je suis plutôt engagée sur les sujets environnementaux et je ne pense pas qu’on puisse bien faire ce métier sans cette sensibilité. Du côté de l’Union Des Marques, je rappelle que nous avons abordé ces problématiques dès 2001, dans le cadre d’une session parties prenantes intitulée « Publicité et Développement Durable ». C’était à l’époque très novateur. Depuis, les mentalités ont beaucoup évolué. Et c’est tant mieux ! Cela étant, ces sujets restent d’actualité, mais nous les traitons différemment. L’Union Des Marques, c’est 230 entreprises, 6 600 correspondants, plus de 1 500 marques, 105 ans d’existence et 3 piliers majeurs :
Nous avons, en 2007, édité la première Charte d’engagements des annonceurs pour la communication responsable, prédécesseur du programme FAIRe (2018). Une démarche pionnière à l’époque, et qui le reste aujourd’hui : aucun de nos homologues dans le monde ne présente d’équivalent aussi robuste ! |
H.B. : Au contraire. C’est un levier puissant de transition écologique. Principalement par les contenus qui peuvent être portés. Avant, on s’intéressait principalement aux supports, à l’écoconception des campagnes. Aujourd’hui, les marques donnent des orientations fortes aux messages : comportements des consommateurs, qualité des produits. Elles sont par nature à l’écoute de leurs consommateurs et peuvent être ainsi un vrai moteur du changement.
À l’Union Des Marques, nous en sommes tellement convaincus, que le programme FAIRe contient un engagement spécifique sur les comportements consommateurs. Nous avons d’ailleurs élaboré en 2020, en collaboration avec des parties prenantes, un Guide de la représentation des comportements écoresponsables en publicité. Son objectif est d’interroger le meilleur choix créatif à opérer pour emmener le consommateur vers un comportement le plus écoresponsable possible.
Il s’agit de donner aux communicants les bons réflexes dans leur démarche. Par exemple, représenter une quantité adéquate de produit, que ce soit au moment achat ou de l’utilisation (détergent, cosmétique, aliment…) ou encore les bons gestes pour limiter l’utilisation de ressources (lumière, robinet…). Grâce à ce guide illustré d’exemples de campagnes, nous voulons montrer aux marques et à leurs partenaires, que c’est non seulement possible, mais aussi que c’est facile et que ce n’est pas une contrainte dans leur travail.
H.B. : Le rôle de la publicité, c’est de transformer les imaginaires. En intégrant les comportements responsables dans les communications, cela les normalise. C’est ce qui peut faire une vraie différence !
Nous savons aussi que les consommateurs peuvent faire face à des injonctions quelquefois contradictoires. Ils demandent aux marques d’être proactives, mais ne se tournent pas systématiquement vers les produits les plus responsables. Ils veulent de la « qualité responsable », mais beaucoup sont contraints de faire leurs courses à 10€ près. Dans ce contexte, le rôle des marques aujourd’hui est de transformer leurs offres et leurs gammes pour aller vers des produits mieux-disant. Par exemple, L’Oréal, dont le Directeur Général Hervé Navellou est le Président de l’Union Des Marques, dispose désormais d’un outil appelé SPOT (Sustainable Product Optimisation Tool). Grâce à cet outil, l’entreprise peut mesurer et améliorer le profil environnemental ou social de chaque produit arrivant sur le marché. Chaque nouveau produit devant avoir un meilleur score que le précédent.
C’est une transition. Intrinsèquement, elle requiert du temps, tout en demandant de continuer à communiquer. C’est là notre principal défi.
H.B. : Tel qu’il ressort de son examen en première lecture à l’Assemblée Nationale et complété par les engagements volontaires des différents acteurs du secteur de la communication, le Projet de loi Climat constitue un dispositif très complet qui renforce considérablement la réglementation de la communication. Il répond en cela aux questions portées par la Convention Citoyenne pour le Climat.
Le texte a fait l’objet lors de son examen à l’Assemblée Nationale d’un record d’amendements déposés sur la publicité. Cela témoigne de l’intérêt extrêmement fort des responsables politiques pour ce sujet [2]. Les choix se sont principalement portés sur l’information et l’accompagnement du consommateur, afin de lui permettre ainsi de choisir. C’est ça la transition.
Il faut laisser la chance au secteur de la communication et aux marques d’accélérer leur transition en matière de communication responsable, d’accompagner celle-ci.
H.B. : Je veux dire aussi que la régulation professionnelle concertée, qui est le principe dans notre profession depuis plusieurs décennies, fonctionne. Même si nous savons que ce point de vue n’est pas toujours partagé. L’autorégulation suit de près les exigences de la société. Cette autorégulation bouge en épousant les nouvelles attentes. Ces dernières sont notamment portées par le Conseil Paritaire de la Publicité qui réunit des représentants des professionnels de la publicité – agences, médias, marques – et d’associations de consommateurs, environnementales et sociétales [3]. C’est un principe plus souple que celui des lois et ça fonctionne !
Ces règles déontologiques sont complétées par les engagements pris par les entreprises dans le cadre de leurs politiques RSE, par exemple, mais aussi dans le cadre de démarches collectives. C’est le cas du Programme FAIRe qui permet aux marques signataires d’identifier les enjeux majeurs ou émergents de communication responsable et de progresser dans leurs pratiques.
S’agissant d’enjeux émergents, en 2017, nous nous intéressions déjà à l’impact environnemental du numérique. À l’époque tout cela était peu documenté et ce n’était pas vraiment un sujet. Mais les choses évoluent très vite et nous avons transformé le contenu de l’engagement du Programme FAIRe (nous préconisons à la fois la mesure et la réduction). Ce qui était prospectif en 2017, est devenu politique en 2021. C’est notre façon de voir les choses et notre objectif : avoir ce temps d’avance et toujours aller un cran plus loin !
H.B. : Beaucoup de progrès ont été faits, de l’écoconception à la fin de vie des produits. Les marques et la filière papier ont beaucoup œuvré, notamment en matière de tri et de recyclage pour que l’imprimé publicitaire soit un support vertueux.
Beaucoup de progrès ont aussi été faits face à des a priori tenaces, même du côté des marques. Il a fallu les convaincre des atouts du papier recyclé et cela porte ces fruits. Aujourd’hui la quasi-totalité des prospectus le sont sur des papiers issus de forêts gérées durablement ou recyclés. Que ce soit chez les professionnels et les consommateurs, il y a maintenant une meilleure connaissance de ce support et de sa matière première.
Nous voyons toujours aujourd’hui une forme d’opposition, notamment sur leur impact environnemental, entre les supports numériques et papiers. Pourtant, une réelle complémentarité existe entre eux. C’est bien sûr un point de vigilance pour nos adhérents et notamment les distributeurs.
H.B. : Pour un Stop-Pub bien respecté ! Aujourd’hui, les sanctions existent dans le cadre de la loi AGEC, ou « loi anti-gaspillage pour une économie circulaire ». Il sera intéressant d’observer si le renforcement de la sanction améliorera l’efficacité de ce dispositif.
Il y a aussi certainement un sujet de pédagogie auprès des petits distributeurs qui, par méconnaissance souvent, peuvent négliger le Stop-Pub.
Enfin, l’expérimentation Oui-Pub, qui est prévue par le Projet de loi Climat montrera quel sera l’impact de ce dispositif inversé sur l’environnement, la filière papier, l’économie et le pouvoir d’achat des Français. Une fois de plus, beaucoup d’a priori gouvernent ces décisions et il faut bien veiller à ne pas être complètement déconnectés avec la réalité économique, notamment celle des ménages.
H.B. : La communication doit être la plus responsable possible. C’est à dire répondre aux enjeux de son époque, dans son contenu, dans sa forme et dans ce qu’elle dit sur le produit et l’entreprise. Ceci est désormais admis et acquis par la profession dans son ensemble.
Via la pédagogie et l’information, notre secteur doit inspirer pour mener le consommateur à faire des choix éclairés et surtout à utiliser son libre arbitre. Par exemple, tous les messages qui vont dans le sens de la quantité adéquate permettent moins de gaspillage et de faire durer les produits. C’est une des nombreuses façons de faire changer les comportements.
Je cite le Trust Barometer de l’agence Edelman : 66 % des Français souhaitent que les dirigeants d’entreprises deviennent acteurs du changement. De fait, nos concitoyens attendent des entreprises plus que la vente de produits ou services. Eh bien cela passe aussi par la communication. Et le prospectus peut et doit, lui aussi, porter ces contenus et ces attentes. C’est une tendance forte et le papier a les atouts pour tenir ce rôle. C’est une voie d’évolution que les consommateurs attendent beaucoup. Donc utilisons-le !
Propos recueillis en Avril 2021
Pour aller plus loinLa Revue du Prospectus consacre un dossier inédit sur la place de la publicité dans la société. Découvrez dès maintenant… L’avis des autres experts :
La réponse de l’expert de MEDIAPOSTE, Nicole Abenhaïm : « MEDIAPOSTE accompagne les évolutions environnementales et sociétales avec ses parties prenantes » |
[1] La génération Y (ou les milléniaux de l’anglais « millennials ») regroupe les personnes nées entre le début des années 1980 et la fin des années 1990. Plus précisément, entre 1984 et 1996 selon un article paru dans la Harvard Business Review.
[2] Au total, tous groupes parlementaires confondus, 5 392 amendements ont été déposés en commission spéciale. 25,7% d’entre eux ont été jugés irrecevables, 442 ont été adoptés.
[3] Composition du CPP : https://www.cpp-pub.org/qui-sommes-nous/composition-du-cpp/