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L’expérimentation a fait consensus

10 janvier 2022
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S’il est bien une profession qui est concernée par le potentiel dispositif Oui-Pub, c’est celle de la grande distribution. La Fédération du Commerce et de la Distribution (FCD) a été une partie prenante très active pendant les discussions préparatoires à l’expérimentation à venir. Nous les avons rencontrés.

La Fédération du Commerce et de la Distribution est une organisation professionnelle qui regroupe une partie des enseignes de la grande distribution, qu’il s’agisse de distribution alimentaire ou de distribution spécialisée.

La plupart sont des représentants des Grandes et Moyennes Surfaces (GMS), notamment des Grandes Surfaces Alimentaires, (GSA) dont Aldi, Auchan, Carrefour, Casino, Cora, Franprix, Lidl…

Également quelques chaines spécialisées telles que : Décathlon, Go Sport, Fnac-Darty, Boulanger. À noter que les enseignes de bricolage possèdent leur propre fédération : la FMB. Tous sont majoritairement utilisateurs de prospectus, catalogues et autres imprimés publicitaires. Pour répondre à nos questions, deux représentants de la FCD :

Philippe Joguet,
Directeur Développement durable, RSE,
Questions financières

 

Giulia Basclet,
Responsable environnement et transport

 

 

Comment accueillez-vous l’arrivé de l’expérimentation « Oui-Pub » l’année prochaine ?

Philippe Joguet : tout d’abord, cette expérimentation s’inscrit, selon nous, dans un contexte plus large que la seule communication des enseignes via le prospectus. Le prospectus est un outil ancien mais aussi très efficace en termes de marketing et de ventes. Il est aussi efficace pour le pouvoir d’achat des ménages en leur faisant connaître les promotions et il existe beaucoup d’études à ce sujet, notamment du côté de l’ADEME, l’an dernier, qui a démontré un fort attachement des Français au prospectus : deux répondants sur trois indiquaient que ces imprimés contribuaient à améliorer les choix de consommation et mieux maîtriser leur budget.

Cela étant dit, nous sommes tous conscients que ce prospectus pose des questions, que ce soit sur sa volumétrie ou ses impacts environnementaux, -même avec un matériau renouvelable et recyclable tel que le papier-, et les déchets qu’il génère.

Face à cette problématique, la réponse des enseignes a été claire : en tant que support papier, il est pris en charge par elles via la REP [NDLR : Responsabilité Élargie des Producteurs[1]] depuis le milieu des années 2000. Ainsi, tous les papiers graphiques, -dont catalogues et prospectus font partie-, mis sur le marché, voient leur fin de vie financée par le metteur en marché via l’éco-organisme Citeo, qui lui-même accompagne les collectivités locales dans cette mission. D’ailleurs les papiers soumis à cette REP sont triés et recyclés à plus de 60 %.

[1] La REP s’inspire du principe « pollueur-payeur » et implique que les acteurs économiques (fabricants, distributeurs, importateurs) sont responsables de l’ensemble du cycle de vie des produits qu’ils mettent sur le marché, de leur éco-conception jusqu’à leur fin de vie. (Source : ADEME)

Mais est-ce suffisant ?

P.J. : non et nous avons agi sur d’autres paramètres. En plus de financer la fin de vie du papier, les distributeurs ont amélioré l’écoconception des prospectus et réduit la volumétrie via un ciblage plus fin et davantage de courriers adressés.

Mais la réduction trouve vite ses limites techniques : on ne communique pas sur du papier bible ! Il y a peu de marge de progression de ce côté. En revanche, nous avons travaillé sur la qualité écologique du papier, via l’utilisation systématique, -et je vous renvoie à notre 5e Observatoire de la Distribution Responsable-, sur papier recyclé et/ou certifié, jusqu’au processus d’impression de type Imprim’vert.

C’est important, car nous pensons que la communication numérique n’a pas supprimé la communication papier. Les deux sont plutôt complémentaires. Ce qui n’empêche pas certaines enseignes d’avoir réfléchi et communiqué sur la réduction ou l’arrêt du papier. Ce sont des annonces dont le tempo, la portée, ou la volumétrie seront à suivre dans le temps.

A lire sur le même sujet : Les règles d’or de l’imprimé publicitaire éco-responsable

Et le Stop-pub ?

P.J. : il existe depuis très longtemps sous l’impulsion d’acteurs, dont la distribution, qui avaient pu contribuer à la connaissance de ce dispositif qui est maintenant homogène en France. De notre côté, nous rappelons l’interdit absolu de déposer des imprimés non adressés dans toutes les boites aux lettres qui afficheraient l’autocollant Stop-Pub. Les professionnels se sont conformés à cette règle ; les ratés qui peuvent exister sont rares et viennent en général d’une communication très locale, parfois sauvage.

Giulia Basclet : la dimension écologique qu’évoque Philippe fait que personne n’a intérêt à ce que des prospectus ne soient pas lus. C’est une question d’optimisation économique dans laquelle le Stop-Pub est une donnée centrale. En outre, dans le cadre d’un plan d’actions volontaires avec l’ADEME, les enseignes de la FCD se sont engagées début 2021 à promouvoir le Stop-Pub (diffusion d’autocollants en magasin, communication sur le dispositif lors de certains événements, …).

A lire sur le même sujet : Une certification AFNOR pour le respect du Stop-Pub

Revenons-en au Oui-pub …

P.J. : quand la remise en cause des prospectus est arrivée dans le débat, avant la loi, la position de la FCD a été de s’opposer fermement à toute interdiction du prospectus. Ce qui n’empêche pas d’accompagner sa réduction ou disparition, au cas par cas.

Si nous pensons, et continuons de penser, que le Stop-Pub est à développer en veillant à le faire mieux connaître, nous nous sommes opposés à l’idée qu’il faudrait mettre en œuvre rapidement et de façon généralisée le « Oui-Pub » en remplacement.

Nous en avons retenu trois. La première, « Oui » à condition que le test associe tous les acteurs économiques : papetiers, imprimeurs, boîteurs, distributeurs et consommateurs. Nous nous félicitons que, in fine, le texte de loi le prévoie bien.

La deuxième, connaître ce qui allait être évalué. L’impact environnemental oui, c’est normal, mais aussi mesurer la dimension économique, ce que l’article prévoit également. Il fallait veiller à la représentativité des collectivités participantes, avec des communes issues du tissu rural, urbain et semi-urbain, de toutes tailles. À date, l’appel à projet a été lancé par l’ADEME mais la sélection est en cours et nous ne connaissons pas l’échantillon retenu. [NDLR : article écrit avant la sélection du 15 décembre 2021]

Enfin, savoir ce qui serait fait de cette expérimentation. Trois ans, comme la loi le prévoit, c’est une durée pertinente pour stabiliser les choses et tirer des enseignements utiles. Six mois avant la fin, un bilan sera remis et nous espérons que son élaboration associera toutes les professions impliquées. C’est une question de légitimité.

Ce bilan devra évaluer les effets positifs et négatifs de l’expérience, ainsi que les leviers et les freins révélés, afin de déterminer les conditions d’une généralisation éventuelle. Les six derniers mois seront donc une étape essentielle du processus au cours de laquelle les parties prenantes échangeront entre elles afin de maturer les conclusions.

G.B. : la profession témoigne d’un véritable volontarisme sur le Oui-Pub, même si nous sommes conscients que cela fait débat et que certains acteurs le redoutent. Il est indéniable que l’expérimentation pourrait précipiter la généralisation du Oui-Pub et les inquiétudes sont normales face à ce changement. Nous pensons néanmoins qu’il faut « crever l’abcès » et qu’il est important d’avoir cette expérimentation pour pouvoir trancher sur des bases objectives.

Quelle va être votre posture pendant les trois années à venir ?

P.J. : Nous resterons vigilants à chacune des étapes :

  • Sélection des collectivités : nous ne surestimons pas notre rôle en ce domaine, puisque c’est la sphère publique qui choisit, nous jugerons donc sur pièce.
  • Déploiement du dispositif expérimental : entre le moment de la sélection des collectivités et le démarrage de l’expérimentation, nous ignorons le temps qui va s’écouler. Il devra être l’occasion d’échanges pour l’ensemble des parties, car il va falloir s’accorder sur la façon dont ce sera fait pour ne pas biaiser les résultats. Ce qui nous protège, ce sont les termes de la loi : une période de trois ans et les autres modalités prévues devraient permettre de dégager des enseignements fiables.

Nos préoccupations majeures tiennent à l’impact économique. Sur nos enseignes bien sûr, mais aussi sur les papetiers, imprimeurs et boîteurs. Également à son corollaire social, car le boitage, pour ne citer que lui, ce sont des emplois locaux dont nous redoutons qu’ils pourraient disparaître.

G.B. : l’expérimentation du Oui-pub ne signe pas la fin des prospectus papiers, c’est important de le dire. Par exemple, dans le cadre de son expérimentation de l’arrêt de la distribution de catalogues en boites aux lettres pour quatre de ses magasins, Carrefour a précisé qu’il était possible de continuer à les recevoir sur demande. Un des enjeux de cette phase de test, c’est de préciser que les clients peuvent continuer à recevoir du papier. Il faut aussi être vigilant sur l’impact environnemental de la dématérialisation des supports de communication et du numérique.

P.J. : j’ajoute que l’information qui devra être faite auprès des ménages est centrale. Les programmes de fidélité seront utiles pour plus de ciblage et plus de qualification pour des enseignes qui voudraient supprimer le non-adressé.

Le consommateur pourra continuer à recevoir les prospectus s’il applique le Oui-Pub. Il y aura donc de gros efforts de pédagogie à faire sur les villes-test.

Cela signifie que le consommateur restera central ?

P.J. : oui, quand les consommateurs ont été remis au cœur des discussions, ils ont d’ailleurs montré leur attachement au prospectus. Chacun selon ses besoins et ses envies. Et ce sera sans doute encore plus explicite avec le Oui-Pub.

Je crois que cela est très important. In fine, la transition écologique, que tout le monde appelle de ses vœux, se fera avec le consommateur. Pas contre. Et cette expérimentation va dans ce sens. Le débat parlementaire a aussi permis de mettre sur la table le sujet du comparatif numérique vs papier que Giulia mentionnait. Les travaux prévus par la loi à ce sujet seront éclairants.

Comme je vous le disais, nous serons très attentifs. La loi nous semble bonne, mais nous veillerons à ce qu’elle soit respectée pour objectiver les résultats et nous attendons la même chose des autres parties prenantes.

Propos recueillis en novembre 2021

 

L’expérimentation a fait consensus