L’écosystème du papier-graphique rassemble divers secteurs et de multiples entreprises. De l’industrie de la pâte et du papier à la distribution en passant par la fabrication des encres ou l’impression, ces entreprises entendent répondre aux enjeux du développement durable. Elles se positionnent dans une dynamique d’amélioration. Principaux objectifs : mettre à disposition des citoyens et utilisateurs un support de communication papier engagé dans l’économie circulaire et performant d’un point de vue environnemental.
Malgré leurs progrès, à l’instar de ceux réalisés par les imprimeurs, les entreprises de l’écosystème du papier-graphique subissent toujours des critiques. S’il est nécessaire qu’elles poursuivent leurs efforts, ces critiques sont-elles toujours justifiées ?
Pas toujours, selon Two Sides. Quel que soit le format (prospectus, catalogue publicitaire, flyer, magazine, journal…), le papier et l’imprimé sont victimes d’idées reçues, selon l’association. Emissions de CO2, déforestation, recyclage… Jan Le Moux, Country Manager de Two Sides France revient sur ces idées préconçues, leur impact, et délivre son analyse sur les défis de l’industrie papetière.
La Revue du Prospectus : pouvez-vous nous présenter Two Sides France ? Ses missions ?
Jan Le Moux : Two Sides est une association active dans le monde entier, et notamment en Europe, qui vise à informer sur la performance environnementale du papier et de l’imprimé. Notre objectif est de mettre à disposition du public et des parties prenantes une information sourcée et documentée sur le papier, l’imprimé et l’environnement. Nous voulons ainsi avoir un dialogue actif, et contribuer à corriger des idées reçues à propos de la production du papier et de son usage.
Two Sides France décline en France les actions mises en place au niveau européen, en les adaptant à notre contexte national. Ainsi nous diffusons des publications pour rétablir les faits concernant les impacts environnementaux du papier. Nous sommes également amenés à dialoguer, mais parfois aussi interpeller, des entreprises qui veulent promouvoir une démarche de digitalisation de leurs activités en mettant en avant des arguments environnementaux infondés, aux dépens du papier.
« Nous interpellons les entreprises qui justifient la digitalisation de leurs activités à partir d’idées reçues sur le papier et son impact environnemental »
Jan Le Moux – Country Manager, Two Sides France
LRDP : le papier a pu cristalliser certains débats lors du vote de loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire. Diriez-vous que ces débats illustrent le manque de connaissance de la société sur les enjeux du papier et de son écosystème ?
JLM : Tout à fait. Ces débats reposent souvent sur des idées reçues, comme je l’évoquais plus tôt. Les idées selon lesquelles le papier contribuerait à la déforestation, serait une source de gaspillage ou générerait des déchets est régulièrement utilisée de manière erronée. Les impacts environnementaux de l’alternative numérique sont, dans le même temps, fréquemment absents des réflexions, ou traités de manière déconnectée, comme s’il n’existait aucun lien entre les différents supports de communication.
LRDP : dans quelle mesure pensez-vous que les idées reçues sur le papier contribuent à la cristallisation des débats ?
JLM : Les idées fausses et la méconnaissance sur les réalités du papier et de l’imprimé rendent difficile le dialogue. Ce qui peut conduire à de mauvaises décisions publiques. Certaines parties prenantes veulent par exemple réduire voire interdire la publicité papier, à commencer par le prospectus distribué en boîtes aux lettres. Ils pensent que la publicité disparaîtra, mais c’est une erreur.
Au-delà d’un débat sur le modèle de société que l’on souhaite, cibler un support de communication en particulier serait en réalité contre-productif. Non seulement la publicité ne disparaîtra pas, mais elle sera transférée vers d’autres moyens de communication. Des outils notamment digitaux, dont les impacts environnementaux explosent, même s’ils sont moins concrets dans le quotidien des citoyens et consommateurs.
LRDP : l’association Two Sides fait régulièrement valoir la démarche de progrès engagée par l’industrie papetière en faveur de l’environnement. Pouvez-vous nous en dire davantage ?
JLM : Pour démonter les idées reçues et poser les bonnes questions, Two Sides s’appuie sur des chiffres clés vérifiés. Par exemple, combien de Français savent que les émissions directes de CO2 de l’industrie papetière ont diminué de 25% entre 2005 et 2017 ? Combien d’entre eux savent qu’entre 2005 et 2015, la surface des forêts en Europe a augmenté d’une superficie équivalente à celle de la Suisse ? Ou encore que taux de recyclage du papier à usage graphique en France dépasse 75% selon une étude de l’ADEME ?
En somme, l’objectif est de montrer qu’avec un taux de recyclage aussi élevé et une ressource renouvelable lorsqu’elle est gérée de manière responsable, l’économie circulaire n’est ni nouvelle, ni accessoire pour l’écosystème du papier-graphique qui l’a déjà compris depuis de nombreuses années.
LRDP : l’industrie papetière européenne se doit de poursuivre la démarche de progrès qu’elle a engagée… Quels sont ses défis dans les années à venir pour que le papier et ses produits finis soient toujours plus responsables, particulièrement vis-à-vis de l’environnement ?
JLM : Comme je le disais, l’économie circulaire est au cœur de l’activité de l’industrie papetière. Pour autant, cela n’empêche pas ses acteurs de chercher à améliorer encore ses performances. Cela peut concerner les impacts environnementaux des sites de production, en développant l’usage de la biomasse ou des CSR (résidus de recyclage valorisables en source d’énergie) par exemple. De la même façon, cela peut viser la performance des produits papetiers eux-mêmes, comme le prospectus ou les journaux. Dans ce cas, les acteurs peuvent notamment travailler à l’écoconception des supports imprimés, en réduisant leur poids ou en améliorant encore leur recyclabilité.
► Découvrir d’autres chiffres sur le papier et le numérique
(1) Source : données de la FAO, organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, 2005-2015
(2) Source : FAO, Évaluation des ressources forestières mondiales, 2015
(3) Source : CEPI, Rapport “Développement Durable”, 2013
(4) Source : ERPC, Rapport de suivi, 2018
(5) Source : Ellen MacArthur Foundation, 2018